Page 6 - Les chemins de fer impériaux d'Alsace-Lorraine (extraits)
P. 6

ORGANISATION DU RÉSEAU ET ASPECTS HUMAINS






                     La ligne Paris – Strasbourg                           Finalement, le 11 juin 1842, les députés votent la « loi
                                                                           relative à l’établissement des grandes lignes de chemin de

                                                                           fer en France ». Après une longue période de tâtonne-
                     En  cette  fin  des  années  1830,  les  projets  ferroviaires
                                                                           ments, cette loi marque un tournant dans la construc-
                     se multiplient un peu partout en France et en Europe.
                                                                           tion des chemins de fer en France. Elle entérine enfin la
                     En 1838, Baptiste Alexis Victor Legrand propose d’éta-
                                                                           création d’une ligne reliant Paris à la frontière de l’Al-
                     blir un réseau ferroviaire en forme d’étoile, centrée sur
                                                                           lemagne, par Nancy et Strasbourg, avec embranchement
                     Paris. Connu sous le nom d’Étoile de Legrand, ce schéma
                                                                           de Frouard à Sarrebruck via Metz. Par la loi du 19 juillet
                     traduit concrètement la vision centraliste et jacobine de
                                                                           1845, l’État concède la ligne à la Compagnie du Chemin
                     la République française.
                                                                           de fer de Paris à Strasbourg. La durée de la concession
                                                                           est fixée à 43 ans et 266 jours.
                     La ligne Paris – Strasbourg figure parmi les axes propo-
                     sés par Legrand, toutefois sont avènement sera long et   Le cahier des charges est particulièrement favorable à la
                     difficile. En effet, malgré l’insistance de ses promoteurs,   compagnie : l’État finance les acquisitions de terrain, les
                     l’État  semble  donner  sa  préférence  à  d’autres  projets.   terrassements,  ainsi  que  la  construction  des  ouvrages
                     Pourtant,  la  ligne  Paris  –  Strasbourg  permettrait  de   d’art, des gares, ateliers et maisons de garde. Restent à la
                     relier  directement  les  régions  industrielles  du  Rhin  et   charge de la compagnie : la voie ferrée, les équipements
                     de la Moselle à Paris et les ports de la façade atlantique.   divers, le matériel roulant ainsi que la construction de
                     D’un point de vue stratégique, elle rapprocherait la capi-  l’embranchement Frouard – Metz – Sarrebruck.
                     tale française des places fortes de l’Est, ce qui présente
                     un intérêt indéniable pour les militaires.
                                                                           Les travaux s’étalent sur plusieurs années et traînent en
                                                                           longueur en raison d’une crise financière et d’une situa-
                     Mais  ces  arguments  ne  convainquent  pas  et  le  projet   tion politique très tendue qui débouche sur la Révolution
                     s’enlise rapidement. Les réclamations de la Chambre de   de  1848.  La  ligne  est  mise  en  service  par  étapes,  en
                     Commerce  de  Strasbourg,  du  Conseil  Général  du  Bas-  commençant par le tronçon Nancy – Frouard – Metz (10
                     Rhin  n’y  changent  rien.  Même  les  courriers  insistants   juillet 1850). Viennent ensuite les tronçons Sarrebourg
                     du  préfet  du  Bas-Rhin  n’émeuvent  guère  les  décideurs   – Strasbourg (29 mai 1851), Metz – Saint-Avold (24 juil-
                     politiques parisiens. Pire encore : ces derniers mettent le   let  1851),  Saint-Avold  –  Forbach  (16  novembre  1851),
                     projet en balance avec une ligne Paris – Dijon – Mulhouse,   Nancy – Sarrebourg (15 août 1852) et enfin Forbach –
                     au grand dam de la capitale alsacienne.               Sarrebruck (16 novembre 1852).




                                                                                      Le 18 juillet 1852, le prince Louis Napoléon (futur
                                                                                      Napoléon III) vient dans la capitale alsacienne
                                                                                      inaugurer le chemin de fer de Paris à Strasbourg.
                                                                                      Les cérémonies, auxquelles sont invitées de nom-
                                                                                      breuses personnalités des deux  rives du  Rhin,
                                                                                      sont fastueuses. On monte un autel et une estrade
                                                                                      surmontés d’un dais et garnis de rideaux de soie
                                                                                      blanche et de brocart d’or. Après avoir célébré une
                                                                                      messe solennelle, l’évêque de Strasbourg bénit les
                                                                                      quatre locomotives à vapeur s’avançant vers lui.
                                                                                      Le soir, le Prince assiste à un défilé paysan puis à
                                                                                      un banquet, tandis qu’on illumine la  cathédrale.
                                                                                      Cette lithographie éditée par  E.  Lemaître repré-
                                                                                      sente en haut la gare de l’Est et en bas la gare de
                                                                                      Strasbourg. À droite et à gauche, on découvre les
                                                                                      tunnels percés dans la vallée de la Zorn, une des
                                                                                      principales difficultés du tracé. Enfin, la scène cen-
                                                                                      trale représente la cérémonie d’inauguration avec
                                                                                      les estrades et les quatre locomotives.

                                                                                      Am  18  Juli  1852  findet  die  feierliche  Einweihung
                                                                                      der Eisenbahnlinie Paris – Straßburg durch Prinz
                                                                                      Louis Napoleon (der künftige Napoleon III.) statt.
                                                                                      Unter den zahlreichen Gästen befinden sich auch
                                                                                      viele Deutsche.





           6
   1   2   3   4   5   6   7   8   9   10   11